CONTROVERSIA LITERARIA FRANCO-ESPAÑOLA
JEAN CASSOU Y EDUARDO GÓMEZ BAQUERO
(1925-1927)
En el curso del año 1924 o quizás a principios del 1925, Jean Cassou pronunció en París una conferencia titulada “L’Espagne, valeur spirituelle, en el Colegio de Francia y, luego, en el Théâtre du Vieux-Colombier. El texto de la conferencia fue publicado en la Revue de Paris [32e Année, N° 9 (1er mai 1925), p. 651-661]. La lectura del artículo inspiró a Eduardo Gómez Baquero una respuesta, “La España de M. Jean Cassou”, a la que contestó el francés, por medio de una “Carta a Andrenio” en el n° 40 de la Revista de Occidente. Gómez Baquero dio fin a la controversia con una segunda respuesta, “España como valor espiritual. Más sobre la España de M. Jean Cassou”. No conozco a ciencia cierta dónde el crítico español publicó inicialmente sus respuestas, aunque es fácil suponer que fuera en unas de sus colaboraciones a distintos periódicos españoles. Las dos respuestas han sido recogidas en el volumen de ese autor, Pirandello y compañía [Madrid, ed. Mundo latino, 1928]; de allí las transcribo.
NB. Publico los cuatro textos en su lengua original, francés para el primero, castellano para los otros tres, con el fin de reproducir las condiciones de ese intercambio. Cuando las notas son de los autores, lo señalo entre corchetes; las demás son mías. Las divisiones de los textos (asteriscos) y títulos intermedios son originales, también la puntuación.
Las notas liminares y el comentario final son míos.
CONFERENCIA DE JEAN CASSOU
En 1925, Jean Cassou (1897-1986) ya se ha dado a conocer en el mundo literario parisino. En marzo de 1917, sale el n°1 de la revista Le Scarabée, Cahier des Lettres et des Arts, de la que es director junto con Étienne Marie. En ella publica poemas, relatos fantásticos y ensayos y se encarga de rúbricas regulares bajo el seudónimo de Juan Rafael. La revista alcanzará 27 números y dejará de parecer en noviembre del 20. Paralelamente, colabora a las Lettres Parisiennes, dirigidas por Georges Pillement (n°1, 1 de junio de 1918-n° 9, 1 de abril de 1920). En colaboración con ese mismo G. Pillement, escribe una fábula en tres actos, Le soleil enchaîné ou la Dame de Champignon, que fue creada en el Vieux-Colombier, el verano del 1919. Su primera novela, Éloge de la folie, Edmond Jaloux la publica en 1925, en la colección que dirige en las Ediciones Émile-Paul Frères.
Los orígenes familiares explican el interés de Jean Cassou por la cultura hispánica. Su padre, Léopold, de padre francés y de madre mejicana, nació en Méjico. Su madre es gaditana. Aunque se crió en Francia (Saint-Quentin en Picardía y París), el idioma que practica en casa es el español. En la Sorbona, prepara una licenciatura en esa asignatura. Poco tiempo después, ingresa en la revista Le Mercure de France en la que se le confía una crónica sobre las Letras españolas.
Bibliografía
– Martín Gijón, Mario, “La vida desdoblada de Jean Cassou”, Cuadernos Hispanoamericanos, n° 747 (2012), p. 101-118).
– Basch, Sophie, Edmond Jaloux et Jean Cassou, dioscures du cosmopolitisme [en ligne], Bruxelles, Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique, 2016.
L’Espagne, valeur spirituelle[1]
L’Espagne est une doctrine secrète, un système clos, irréductible, auquel après tant de siècles, nos illusoires interprétations n’ont su arracher que des codes de chevalerie, des guides de tourisme et des leçons de guitare. Cependant, de récents événements, un frémissement intellectuel né du désastre de 1898 et qu’il nous faut bien percevoir ont axé l’attention sur l’affirmation de l’Espagne, son existence, l’explication du monde qu’elle paraît apporter et la nécessité qu’elle constitue pour lui.
L’Espagne à travers les voyageurs romantiques, Gautier et Borrow, peut nous demeurer un vaste atelier, un magasin de bric-à-brac, le souvenir d’un arsenal où des esprits faciles auront pu inlassablement puiser des couleurs, des motifs, des intrigues, bref tout ce dont notre sensibilité se donne aujourd’hui le fier mérite de ne plus se servir. Barrès, le premier, découvrit, à la suite de certains Espagnols de la génération de 98, le sens de la Castille et l’émotion qui pouvait jaillir directement d’un vaste paysage désert. Aux thèmes pittoresques de l’Andalousie, tout un programme spirituel s’ajoutait ou s’opposait. En réalité, il s’agissait d’une tradition retrouvée, accrue, prolongée, et qui s’épanouit à présent en cette doctrine dont nous est offerte la clef.
Un jeune écrivain, Jorge Guillén, a parlé un jour de « cette fatalité d’être Espagnol »[2]. Être Espagnol, en effet, comme être Juif et être Russe, rattache celui qui se trouve dans ce cas à un passé lointain et inéluctable, lui imprime une marque si particulière qu’elle efface ces traits d’humanité par lesquels il pourrait, à certains âges de sa vie ou à certains moments de son histoire, se confondre dans les mouvements des autres peuples. Les écrivains espagnols, même si, comme les nôtres, ils se livrent à un art pur ou à la plus libre fantaisie de leur démon, semblent toujours relever d’une préoccupation tacite qui leur est commune, ou bien ils ne peuvent s’empêcher d’y revenir par quelque allusion plus ou moins détournée. De même les hispanisants, et tous ceux qui ont la connaissance de l’Espagne, – c’est-à-dire qui en subissent la conquête -, se rencontrent sur un même terrain et se trouvent amenés à reconstruire, avec des citations d’Unamuno, de Ganivet ou d’Ortega, un objet dont il leur paraît que les profanes ne peuvent se faire la moindre conception : même tel texte ancien, les Coplas de Jorge Manrique, une tirade de la Célestine, l’épître de l’anonyme Sévillan[3], où d’aucuns verraient la paraphrase d’un thème moral de l’antiquité[4], ils y entendent une résonance particulière.
Que l’Espagnol, comme le Juif et le Russe, soit porteur d’une mission, cela n’est pas douteux. Il est choisi ; il répond à une terre indiscutablement significative et à des souvenirs dont lui seul peut soutenir la charge et comprendre la volonté. De là ce désaccord et ce malentendu entre nos lieux communs sur une race dont nous prétendons ne rien ignorer et l’étonnement ou la déception dans laquelle nous plongent les approximations plus serrées qu’il nous arrive d’en faire. L’idée de l’Espagne est dense comme les métaux les plus denses, compacte, résistante et profonde.
La renaissance de 1898 a été un retour de conscience, une redécouverte de cette nature définie et spéciale de l’être espagnol. Miguel de Unamuno, avec son En torno al casticismo[5], Angel Ganivet avec son Idearium Espanol peuvent être considérés comme les hérauts de ce réveil. Et autour d’eux, Ramiro de Maeztu, le poète Antonio Machado avec ses chants profonds, Azorín avec ses interrogations de l’esprit et du paysage populaire, Pío Baroja avec ses romans de la vie aventureuse reforment le visage authentique de l’Espagne.
À leur suite, Ortega y Gasset, Ramón Pérez de Ayala, plus jeunes, mais non moins ardents et curieux; Eugenio d’Ors, avec son affirmation de cette nuance méditerranéenne du problème espagnol que représente la culture catalane; Ramón Gómez de la Serna avec son courageux et joyeux essai d’une somme physique et morale de son temps, d’autres encore ont retrouvé le fil qui, à travers leur labyrinthe personnel, les renouait à une tradition irrécusable et ont souffert de ce mal délicieux qui les faisait si solitaires.
Car de même que la dépendance où ils sont d’un passé absolument singulier a pu les éloigner de l’Europe, les circonstances où se trouve placée l’Espagne en ce moment les sépare de leur propre public espagnol. Depuis les temps où le romantique Larra s’écriait désespérément : « Écrire à Madrid, c’est pleurer ! », il n’y a pas eu dans l’évolution de la nation la moindre culture continue et progressive. L’ignorance de la classe moyenne, l’inexistence de la vie mondaine, une étrange atonie générale, une indifférence totale à toute aspiration intellectuelle et civile, diverses conditions sociales que ce n’est pas le lieu de déterminer ici, font que l’écrivain continue de vivre en dehors de la race qu’il sait si bien interpréter et ne peut guère se sentir d’accord qu’avec les morts et cette vague entité qui s’appelle l’âme populaire.
On a souvent parlé de l’individualisme espagnol. On a vu, dans l’impuissance où se trouve ce peuple à organiser une action collective, les raisons de son désordre politique, de son infériorité économique et militaire ; aussi ses entreprises intellectuelles, dont on ne saisissait pas la cohérence et les intentions, ont-elles été reléguées parmi celles des nations secondaires. Cet individualisme expliquerait aussi que l’intellectuel espagnol s’efforçât au milieu d’un tel désert et d’une insouciance aussi générale. Mais il faut compléter cette notion de l’individualisme espagnol par celle du phénomène qu’on a appelé l’adamisme espagnol, c’est-à-dire que chaque créateur espagnol se trouve dans la position d’Adam, le premier homme. Aucun enseignement pratique ne lui a été transmis, aucune école, aucune expérience ne le soutient. Il surgit brusquement, librement, et doit, seul, tout recommencer et réinventer. Goya apparaît au milieu d’un siècle totalement vide et ne laisse après lui que son œuvre. Il faut arriver à nos jours pour que la peinture espagnole ressuscite. Cependant un lieu unit les grandes individualités nées dans une telle absence de circonstances : le sentiment qu’elles ont de leur race et de ses aspirations les plus singulières.
Mais rien ne les satisfait ni ne répond à leur appel. L’Espagne est, de tous les pays, celui qui peut le plus produire des individualités originales, puissantes, libres, prêtes à se développer jusqu’à leurs points extrêmes ; mais elle les abandonne aussitôt à leur solitude. Ces créateurs, s’il leur faut une matière humaine où s’exercer, ne la trouveront pas. « Tu me demandes, mon bon ami, écrit Miguel de Unamuno, dans la préface de sa Vie de Don Quichotte et de Sancho, si je connais le moyen de déchaîner un délire, un vertige, une folie quelconque sur ces pauvres multitudes ordonnées et tranquilles qui naissent, mangent, dorment, se reproduisent et meurent… ».
Ainsi une sorte d’angoisse pèse sur l’agitation intellectuelle de l’élite. Faut-il croire qu’au-delà du vide immédiat où elle se meut, une fin existe à laquelle sont destinées ses affirmations, et que, si la nation espagnole ne l’entend plus, L’Europe accueillera cet appel de la pensée espagnole et les principes esthétiques et moraux qui l’animent ?
Il existe en ce moment à Madrid un des penseurs les plus personnels et les plus vivants qui soient, José Ortega y Gasset. Il a écrit de nombreux essais sur le problème national. Il a fondé et il dirige une des plus importantes grandes revues européennes, La Revista de Occidente, où rien de la pensée actuelle allemande, anglaise, italienne, française ne laisse d’être examiné. Mais il faut que cet esprit, perpétuellement découragé par l’indifférence qui l’accueille immédiatement, se console en imaginant des « minorités sélectionnées » que composent quelques grands Européens et qui, par leur propre nature, sont impuissantes à agir sur le désordre de la culture et de la société de leurs temps. Nous ne sommes plus dans un siècle, comme le XIXe, que dominaient la politique et la technique, c’est-à-dire l’application des principes inventés par les minorités, et où une communication évidente reliait celle-ci à la masse. Aujourd’hui le penseur doit retrouver le sens de l’humilité : « L’orgueil, c’était cette ancienne prétention de diriger les foules et de rendre heureuse l’humanité[6] ». Le penseur ne peut plus agir à l’intérieur de ce cosmopolitisme intellectuel, plus fécond, il faut l’espérer, que l’internationalisme politique et la tentative de la Société des Nations ; il doit sentir « sa dignité et sa misère, sa vertu et sa limitation ».
Plus qu’un intellectuel d’aucun pays, on comprend qu’un Espagnol tienne ce langage.
Ce silence du public espagnol autour des ouvrages de ses plus hauts représentants, faut-il l’imputer au particularisme de la race, à des raisons sociales, à ce que l’on pourrait considérer comme des retards par rapport à ce qui semble être le progrès chez les nations voisines ? Mais la race ne risque-t-elle pas, en s’uniformisant, de perdre quelques-unes de ses plus précieuses qualités ? Miguel de Unamuno a posé la question de savoir s’il fallait européaniser l’Espagne ou l’africaniser. Et il s’est répondu par un fier paradoxe qui est bien dans sa manière : il ne faut ni européaniser ni africaniser l’Espagne. Il faut espagnoliser l’Europe.
Et quoi ! Celle-ci a bien assez souvent accepté de se franciser ou de s’angliciser pour ne pas refuser la solution unamunienne. La voilà à présent qui rêve de s’orientaliser. Mais le jour où les divers éléments qui la composent seront parvenus à leur plus vive intensité de rendement, le jour où elle sera et très française et très anglaise, très latine et très germanique – et très espagnole -, ce jour-là, l’Europe se sera ressaisie.
Nous assistons près de nous, à un mouvement puissant : des individualités très originales, des efforts héroïques se groupent autour de quelque chose qui échappe à nos tentatives et tendent à exprimer un angoissant secret commun. La race dont ces peintres, musiciens, écrivains, penseurs portent gravée en eux la tragédie, il nous faut la confesser et lui arracher des vertus qui pourraient nous servir d’exemple. Sur le marché des valeurs européennes il en est une qui réclame sa place et de laquelle nous n’avons eu jusqu’ici qu’une idée confuse : c’est la valeur Espagne. Ces hommes qui débattent dans leur trouble intérieur et dans le trouble de leur politique, s’ils ne viennent à nous qu’avec peine, parce que nous ne nous sommes pas entendus avec eux sur les principes, il nous faut aller à eux et démêler ces principes dont ils relèvent : ils sont avec eux dans une si étroite communion que nous n’arrivons à saisir leurs intentions que si nous avons analysé les traits moraux et physiques du climat, de la tradition, de la religion, de toute cette philosophia hispanica qu’ils portent toujours dans leur sang.
Il serait étrange de dire du peuple qui a produit les plus grands peintres de l’histoire que c’est un peuple pour qui le monde extérieur n’existe pas. Mais on pourrait l’oser s’il n’était plus véritable d’affirmer que rien n’existe pour lui. Rien, nada, le mot le plus espagnol de la langue espagnole.
L’Espagnol, naissant dans la solitude, que nul préjugé ni nulle épreuve n’ont instruit, et qui, s’il se sent le désir de s’exprimer, le fera sans règle, sans direction et sans ordre, est l’être le plus libre et le plus absolu. Aucune discipline ne l’attache, aucun vœu, aucune aspiration plus forte que la sienne. Une fureur intérieure et brûlante semble le premier trait de cette race, et qui lui vient peut-être du mépris qu’elle a pu acquérir pour le sol trop nu et trop amer qui lui a été départi. Toujours prête à se dépendre de toute chose, elle juge que toute chose peut être jouée, risquée, défiée. L’Espagnol joue l’or de ses Amériques et le salut éternel de son âme. Le monde des volontés humaines paraît à Iñigo de Loyola un objet aussi digne de sa conquête qu’une belle femme ou qu’une place-forte. Les religieux ont inventé mille sortes de manuels et de recettes pour gagner le paradis, et les dramaturges ont imaginé des comédies où celui-ci s’acquiert et se perd avec une magnifique désinvolture. Don Juan joue toutes les filles de la terre et s’en dégoûte une fois la partie gagnée, jusqu’à l’injure à une ombre et l’audace suprême de cette main tendue à une main de marbre. Le Sigismond de Calderón finit par accepter avec la même sereine indifférence de vivre un rêve ou de rêver sa vie. Góngora et Gracián, ayant dépouillé les mots de leurs usages quotidiens, en compliquent l’exercice jusqu’à l’obscurité la plus pure, à la façon de ces autels de l’architecture baroque chargés d’inventions, de contradictions et d’extravagances. Et l’on devine les développements que fourniraient les exemples trop faciles de sainte Thérèse et de Don Quichotte pour qui seule une idée méritait à peine d’être vécue. Encore Don Quichotte n’y croyait-il guère, et il faudrait s’entendre sur ce que pouvait bien signifier pour sainte Thérèse la foi religieuse.
Ce détachement du monde extérieur paraîtrait même chez les grands réalistes. Les romanciers picaresques ne peignent la réalité qu’en la déformant en de brutales et superbes caricatures : ils racontent une traversée de la vie qui ne démontre rien et n’aboutit à rien, au contraire de la sagesse et de l’expérience que nous pouvons recueillir des comédies de Molière, des fables de la Fontaine et des romans de Le Sage. Les peintres qui sembleraient au premier abord devoir appuyer une théorie de l’Espagne peuple réaliste, aiment souvent, tels le Greco de l’Enterrement d’Orgaz, compléter et justifier leur vision de la terre par l’opposition de la gloire et des sphères supérieures. D’autres par l’évocation de la mort. Des nuages, chez Murillo, nous enlèvent à la grossièreté du sol domestique. Les légendes de Goya signifient un vide insondable et le dédain du néant lui-même : N’ouvre pas les yeux – Ne t’afflige pas – Rien. Si l’on va jusqu’au plus absolu des imitateurs de la réalité, Diego de Velásquez, il ne faut reconnaître chez lui aucune volupté de vivre, aucune divine splendeur, aucun lyrisme ; comme chez les Vénitiens et les Flamands ne viennent rehausser la reproduction des choses. Et je veux imaginer que cet homme, par une coquetterie dernière de la race qui le produisait, n’a peint d’une main si hautaine le temps et l’espace, les princesses, les ivrognes, les rois avec leurs chiens et les idiots avec leurs ombres, que pour nous dire : « N’est-ce que cela ? »
On a parlé du nihilisme slave : l’espagnol est plus extrême. Le premier s’arrête devant le sentiment schopenhauérien de la pitié. Mais ici nous sommes pressés jusqu’à une constatation qui heurtera peut-être bien des idées convenues : les Espagnols ne connaissent pas la foi.
Certes leur mépris de la réalité, leur goût du jeu et de l’aventure les ont amenés à cette entreprise, opposée et semblable tout ensemble à celle des peintres, des romanciers et des dramaturges, qui est celle des grands mystiques et qui nous enseigne la limite de ce que peut l’esprit en face de la matière : souffler plus fort et passer. Ces étrangers poètes ont osé exprimer l’extrême de l’intelligible, au point dernier de l’existence, avant la défaillance et l’évanouissement. Une combustion finale dissout les sens, les arrache à ce monde si familièrement triste, un délire soulève l’âme, une musique toute nue et pure la ravit, comme le rythme de la Danse du feu de Manuel de Falla. Toute cette ascèse où disparaissent les dissociations de notre expérience vitale, de notre langage et de notre humanité terrestre, c’est une façon plus rapide et plus sûre d’approcher de la mort, objet suprême du culte espagnol. Mais la foi ?
Notre foi, tout emportée qu’elle puisse être par les faveurs miraculeuses de la grâce, se soutient sur des principes et des dogmes. Il nous faut une vérité valable pour tous, une satisfaction universelle que, d’ailleurs, lorsque que notre raison ne pouvait plus la retrouver dans les enseignements de l’Église romaine, nous avons cherchées dans les abstractions révolutionnaires. Mais lorsqu’un Miguel de Unamuno proclame sa haine de l’idéocratie, c’est un sentiment bien espagnol qu’il exprime. Les Espagnols n’ont que faire d’idées. Ils n’ont laissé à la civilisation aucun traité, aucune somme, aucun code, ni Discours de la Méthode, ni Critique de la raison pure, ni Fondement de la morale, ni Discours sur l’Esprit positif, ni même Apologie de la Religion chrétienne[7]. Ils ont entassé dans leurs cathédrales trop d’éclatantes idoles pour que l’on puisse confondre leurs affirmations religieuses avec les nôtres. Et leur religiosité n’aura besoin, pour revivre, de la balance d’aucun XVIIIe siècle, d’aucune réaction critique. Car rien, en elle, n’est à critiquer. Elle n’est qu’un ensemble d’images parlantes qui n’ont rien à faire avec une adhésion quelconque de l’esprit. Un ensemble, une construction plastique, une esthétique. Ce peuple, que dégoûte la vision de la réalité extérieure et qui, par un effort d’aigle, s’est élevé aux limites du délire, s’il se complaît à ces mouvements de l’âme, à ces prodigieux tumultes du sentiment, ceux-ci ne sauraient le fixer. Dieu, la mort, l’amour et nos diverses affections ne peuvent lui apparaître sous forme de problèmes à résoudre. Mais il se sent poussé à les exprimer en gestes, en ces lignes stellaires, ces jets des chansons et des danses populaires et ces assemblages significatifs de fleurs, de sang et de couleurs qui donnent aux fêtes espagnoles un accent si profondément irrésistible.
La merveille c’est que ce sentiment de la mort s’exprime d’une façon si violente, si luxueuse. Ici paraît une des contradictions du caractère espagnol. Celui-ci, nous le voyons incroyant, nihiliste, dédaigneux de la réalité du travail, des principes qui permettent et soutiennent l’action. L’ironie espagnole est d’une férocité et d’une profondeur inimaginables. Avec quelle joie elle se complaît à voir le monde lui échapper à travers les déformations de perspective et les caricatures où elle se joue ! Un ami m’a raconté avoir entendu, en chemin de fer, un paysan andalou qui venait de monter dans le même wagon que lui, soupirer en s’étendant sur la banquette : « Qué lejo, étà to’o ! » « Comme tout est loin ! » Il y a dans ce mot, prononcé avec toute la nonchalance de l’accent andalou, une lassitude, faite d’humour et de désespoir, au-delà de laquelle la pensée doit s’arrêter.
Et cependant il existe un point où ce nihilisme et cette ironie se concilient avec de la passion, de l’art, de la joie, ce goût invincible du risque et de l’aventure dont j’ai parlé, bref l’amour de la vie. Ces grands paresseux, lorsqu’ils se réalisent, manifestent une fécondité monstrueuse, un incoercible besoin de se dépenser. On sait les proportions gigantesques de l’œuvre d’un Lope, d’un Calderón et, de nos jours, d’un Gómez de la Serna. Il ne faut pas s’imaginer que l’œuvre de Góngora qui, par tant de côtés, ressemble à celle de Mallarmé, ait été, comme celle-ci, conçue et exécutée avec un effort lent, patient, difficile, dont les interruptions ont autant de densité que les moments d’expression : c’est une œuvre riche, nombreuse et où, à certains traits, on voit paraître un homme vif, nerveux et méchant. Que d’ardeur comportent la vie aventureuse, l’œuvre enthousiaste d’un Blasco Ibañez, ce grand vivant ! La parole de cet homme, sa présence, ses entreprises forment un foyer d’énergie perpétuellement en action. Il y a, dans la nature foncière de cet écrivain dont les romans se traduisent si aisément en toutes les langues, beaucoup plus d’espagnolisme qu’on ne veut en voir. D’ailleurs l’Espagne est une inépuisable source de types originaux. Et la vie des Espagnols illustres offrirait mille autres exemples étonnants d’indépendance et de puissance personnelles. L’existence d’un Quevedo est la chose la plus noble, la plus rapide, la plus inasservissable. Le caprice, la révolte, la violence, la fierté caractérisent ces hommes, un besoin d’affirmer immédiatement une opposition, d’incarner une contradiction et un refus. « Y a mi qué ? » est le mot que les Espagnols ont le plus souvent à la bouche, c’est-à-dire : « Et à moi, que voulez-vous que cela me fasse ? Qu’on ne vienne pas me raconter des histoires ! Je les dédaigne, elles ne me touchent ni ne m’engagent. Rien ne saurait m’atteindre. Je suis au-dessus de tout. » L’idée d’une dépendance quelconque est insupportable à un Espagnol. Il s’enorgueillit de l’intégrité de son tempérament et imagine que c’est lui qui crée les choses et en dispose à son gré. L’œuvre perpétuellement – et si tranquillement ! – protéenne du malaguène Pablo Picasso peut servir d’illustration à cette indomptable fantaisie.
Nul n’est plus dégagé de superstitions que l’Espagnol. Partout il emporte sa liberté. Il ne s’embarrasse ni ne s’étonne de rien ; au contraire, ce détachement lui permet de jouir de tous les spectacles, de tous les changements et de toutes les découvertes qu’il fait parmi les objets et les hommes. Ici c’est l’œuvre de Ramón Gómez de la Serna que nous prendrons pour marque de cette disposition. Il est quelque chose que les Espagnols peuvent nous apprendre : c’est à respirer.
Mais ce point auquel un Espagnol concilie son exubérance avec le mépris de toute chose et l’idée de la mort, comment le déterminer ? Cette conciliation du scepticisme et de la passion paraît un étrange mystère et un problème insoluble. Peut-être faut-il, pour le comprendre, l’élargir, et imaginer que la puissance spirituelle de notre race humaine est telle que l’idée même du néant comporte son énergie et que nous ne sommes jamais autant désireux de vivre et de nous manifester qu’une fois parvenus au terme du désespoir et du renoncement.
Évidemment il nous faut conclure que, dans cette position extrême, l’énergie espagnole ne peut se dépenser que par une activité absolument désintéressée et en vue de la fin la moins prévisible. La grande création de l’Espagnol, c’est l’absurde. Pour l’absurde il est né, dans l’absurde il se meut. Inapte à la guerre, incapable de réflexion et de logique, l’Espagnol n’est pas courageux, mais il peut être un héros ; c’est ce qui explique tant de défaites militaires et d’entreprises insensées ; c’est ce qui explique aussi qu’il nous arrive de voir parfois, au cours du livre de Cervantes, Don Quichotte trembler. Mais c’est aussi ce goût de l’absurde qui empêche l’âme espagnole de sombrer dans le sommeil.
Le phénomène espagnol nous conduit à mesurer dans toute son immensité le néant qui nous constitue ; mais un bord de cette effrayante considération, un effort soudain, et le plus puissant qui soit, nous ressaisit et nous rejette au milieu d’une flambée de vie libre et aventureuse. Toute une tradition de force vive nous apparaît, sous un aspect de contradictions, de négociations, de tentatives discontinues, de vides et d’abîmes, qui peut nous rendre son abord difficile, sinon impraticable. Mais une fois certaines exigences admises, l’emprise du pays espagnol est si forte que ceux qui l’acceptent oublient toute autre retenue ; elle a pu s’exercer sur trois fameux étrangers : Christophe Colomb, le Gréco, Philippe II. Ceux-ci ont imaginé, chacun, une Espagne qui se dépassait elle-même et s’exaltait jusqu’à un état si monstrueux qu’il en était insoutenable. L’Espagne saisit par cet attrait vertigineux qu’offre la liberté suprême d’un néant accepté, reconnu et adoré, ce délice que peut laisser à un esprit le dépouillement de tout ce qui n’est pas une image de la mort. Mais l’esprit, ainsi allégé, remonte à des hauteurs et connaît des espaces insoupçonnés : il trouve même à ce brusque changement d’altitude un plaisir que d’autres mondes ne sauraient procurer. Pour nous, si certaines formes de culture nous fournissent des exemples d’autorité ou d’harmonie, nous devons être reconnaissants à l’Espagne d’avoir assumé, par les déséquilibres qui la composent et la déchirent, le visage tragique de l’humanité.
JEAN CASSOU
COMENTARIO
Es habitual que un conferenciante exponga en sus primeras palabras lo arduo de la tarea que emprende y afirme al mismo tiempo que sabrá vencer la dificultad. Algunas formulaciones arriesgadas o enigmáticas sirven además para despertar la curiosidad de los oyentes. Para el comentarista, el asunto es bastante más difícil. Para aclarar el contenido del mensaje, necesita descubrir una forma de continuidad en la argumentación del conferenciante para poder asentar su análisis en una base medianamente sólida.
La demostración de Cassou se basa en unos conceptos que el título de la conferencia no traduce exactamente. Para empezar, proclama una especifidad española que los viajeros extranjeros de los siglos XIX han percibido y traducido solo superficialmente. Esta especificidad es herencia de un pasado multisecular que impidió a esa nación fundirse en el molde común. La pérdida del imperio colonial en 1898 ha extirpado violentamente a los españoles de aquella historia inmemorial, pero la toma de conciencia no concierne sino a un grupo reducido de artistas e intelectuales, cuyas obras encuentran un eco débil en su propio país.
Ante tan desolador panorama, el crítico extranjero debe procurar deshacer la maraña de esas contradicciones y analizar sus causas. Indiferencia colectiva ante el futuro, desprecio del mundo, actitud nihilista, soledad del creador se conjugan para explicar una familiaridad con la muerte, desprovista de cualquier dimensión trágica. Paradójicamente, esa acumulación de renuncias no obstaculiza un ímpetu vital, que se traduce por una afición inmoderada por la independencia personal y una forma de ironía que roza con lo absurdo. Esta contradicción aparente obliga a revisar los tópicos acumulados, hasta el extremo de considerar que la nada deja libre un espacio para una forma suprema de libertad.
Las referencias históricas, los numerosos intelectuales citados, algunas anécdotas esclarecedoras componen un discurso de iniciación más que una exposición ex cathedra. El uso de datos eruditos no pretende impresionar sino ofrecer materia a algunas afirmaciones contundentes y a paralelos inesperados.
Al pronunciar su conferencia en dos lugares tan distintos como el Collège de France y el Théâtre du Vieux-Colombier, Cassou manifiesta la voluntad de dirigirse a dos públicos también distintos, ambos franceses y parisinos. Ante aquél, principalmente universitario, quizás haya querido combatir la opinión de cierta intelectualidad francesa hacia una cultura a la que juzgaba inferior. En cuanto al público del Vieux-Colombier, se trataba más bien de deshacer los prejuicios acumulados en un contacto superficial con España, que el turismo naciente y un folklore sin autenticidad contribuyeron a crear.
Con todo, sería más justo buscar la motivación principal de Jean Cassou en la exigencia que le imponía la deuda contraída con una cultura que le era familiar, en todos los sentidos de la palabra. Es una reacción natural en el exiliado y sus descendientes inmediatos cuando persiste un malentendido entre el país de acogida y el de los orígenes: desde la situación privilegiada de que goza, es decir “desde dentro”, siente el deber de intervenir, con la esperanza de que su voz será oída mejor que una de Tras el Pirineo.
Si esa fue la ambición de Jean Cassou, habrá sido colmada más allá de sus esperanzas, ya que, al publicar el texto de su conferencia en la Revue de Paris, lo sometía directamente al juicio de un lectorado, los críticos españoles, mucho más exigente que el público parisino.
PRIMERA RESPUESTA DE EDUARDO GÓMEZ BAQUERO
Eduardo Gómez Baquero, alias Andrenio, (1866-1929°, además de jurista (doctor en derecho), fue un periodista y crítico que colaboró activamente a diarios nacionales así como a revistas literarias. Publicó tardíamente algunas novelas y cuentos.
Su talento crítico ha sido unánimemente celebrado y le valió ocupar en 1901, en El Imparcial, el puesto que quedó vacante al morir Leopoldo Alas Clarín. Cuando interviene este intercambio con Jean Cassou, colabora, entre otros, con El Sol, prestigioso diario madrileño. Su gran cultura, el rigor de sus análisis, la firmeza de sus principios, la moderación de su estilo, la calidad de su prosa, siguen siendo notables para un lector de hoy. Acababa de ingresar (1924) a la Real Academia Española.
La confrontación entre el crítico experimentado y el escritor francés en ciernes nos ofrece una visión contrastada de la cultura española en sus manifestaciones más recientes, en ese primer cuarto del siglo XX.
Jean Cassou no podía quejarse por contar con un lector tan avezado, cuyo juicio crítico podía resultar utilísimo en la perspectiva de trabajos futuros, con tal de que supiera aprovecharlo.
La España de M. Jean Cassou
I
M. Jean Cassou no es ciertamente un indocumentado respecto a la literatura española. En el Mercurio de Francia sigue asiduamente el movimiento literario de España. Mas la literatura contemporánea es la más difícil de apreciar por un extranjero, que guiándose por algunos escritores de moda o de su predilección puede sacar fácilmente conclusiones generales fantásticas o establecer valoraciones que no sean las vigentes en el país de origen, ni las que razonablemente tienen promesa de porvenir.
A la dificultad que ofrece, aun para el más próximo espectador, la justa estimación de lo actual, porque está haciéndose y falta la lejanía necesaria para la perspectiva, se une en el caso del extranjero, el menor conocimiento del medio, de la psicología de los autores, de la actitud del público, de todo lo que forma el ambiente literario y también de la trasescena de las letras. Por eso se observa que mientras los autores y los asuntos clásicos, todo lo que es ya historia literaria, es tratado con suma competencia por los estudiosos extranjeros— como se ve en el caso de España en los trabajos de los hispanófilos —, rara vez adquieren el mismo nivel los estudios sobre la literatura moderna. Todavía más inseguras y falibles son las interpretaciones psicológicas sobre el carácter de un pueblo, sacadas de su literatura. La psicología de los pueblos, más que verdadera ciencia constituida, es un nombre, un rótulo científico. Sus conjeturas a veces son cómicas, aunque se formulen con la mayor seriedad, o bien vuelan por espacios imaginarios, en alas de la inventiva literaria de los autores.
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Viene lo anterior a cuento de un estudio de M. Jean Cassou: L’Espagne, valeur spirituelle, que he visto en la Revue de Paris y que es el texto de una conferencia leída en el Colegio de Francia y después en el teatro del Vieux Colombier.
Conviene hacer la salvedad de que el estudio de M. Cassou no está inspirado en sentimientos de hostilidad a España. Todo lo contrario; el autor no pretende deprimirnos, sino enaltecernos, pero llevado de una psicología romántica más peligrosa que el colorismo romántico, hace de España una especie de esfinge, un pueblo aparte, que no tiene analogía con los demás, una figura singular en la historia, casi un monstruo.
“España— dice —es una doctrina secreta, un sistema cerrado irreductible, al cual después de tantos siglos no hemos sabido arrancar más que códigos de caballería, guías de turismo y lecciones de guitarra.” Esta frase se completa con la final: “Si ciertas formas de cultura nos ofrecen ejemplos de autoridad y de armonía, debemos agradecer a España que por los desequilibrios que la componen y la desgarran, asuma la máscara trágica de la humanidad.” Ambas expresiones dan una idea sucinta, pero exacta, del carácter de este ensayo, de agradable forma, pero desprovisto de la precisión y exactitud necesarias cuando se pretende hacer el retrato histórico y moral de un pueblo.
No es, a la verdad, achaque o error particular de M. Cassou. Su escrito es un espejo de la dolencia que aqueja al ensayo moderno y que no es otra que el exceso de subjetivismo y de lirismo. Sin duda, el ensayo es una visión personal y literaria de un tema, pero cuando versa sobre cosas reales, no debe olvidar el contenido objetivo. Su subjetivismo, para ser legítimo, ha de estar en la manera y el estilo. Inventar una realidad, embriagándose con el lenguaje figurado, tomar las imágenes que se le ocurran al ensayista, como explicaciones fundadas, sin contrastarlas, no puede conducir más que a escribir lírica en prosa, tal vez menos respetuosa con la realidad que la auténtica lírica.
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Gautier y Borrow, dice M. Cassou, sólo vieron en España un almacén de colorismo. Mauricio Barrès descubrió el sentido de Castilla. Pero aunque Barrès sea más afín a nuestra sensibilidad literaria moderna, hay en aquellos otros autores, a pesar del colorismo indiscutible de Gautier y del relativo de don Jorgito, el inglés[8], una suma de observación realista y de pormenores objetivos trasladados exactamente que no ha sido superada en modo alguno por Barrès, en sus elegantes interpretaciones del alma hispana.
Cassou se representa al pueblo español como un pueblo excepcional, ligado — dice —“a un pasado lejano e ineluctable”, de donde se desprende una fatalidad como la del judío o el ruso, que le imprime el sello de un carácter y un destino singulares y borra los comunes rasgos de humanidad que hacen semejantes a los pueblos. En suma, M. Cassou en el curso de su conferencia reproduce la especie no ciertamente nueva, que presenta a España como un pueblo místico, penetrado del sentimiento de la muerte, indiferente al espectáculo del mundo exterior, desdeñoso de lo sensible, poseído de un individualismo y de una obsesión de eternidad, que haciéndole apto para producir personalidades de una potente originalidad, las condena a la soledad y a la indiferencia, por la predisposición de cada sujeto a encerrarse en sí mismo. Algo de barresiano hay en esta concepción, y también se muestra influido el señor Cassou por la idea del adamismo español expuesta por el señor Ortega y Gasset, según la cual falta entre nosotros el espíritu de continuidad y cada español notable es, en su esfera, como un Adam que empieza la historia humana.
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Nunca me ha convencido esta imagen de la condición española. La creo desmentida por el testimonio fehaciente de la historia. Los hechos nos dicen que España se romanizó profundamente; que en el curso de su historia ha estado abierta a muchas influencias y ha sido capaz de asimilárselas, de digerirlas incorporando a su propia manera de ser castiza las aportaciones extrañas; que a pesar del relativo, nunca absoluto, aislamiento en que su posición geográfica y los accidentes históricos la confinaron en ciertas épocas, no dejó de participar en mayor o menor medida y a veces muy intensamente de los afanes e inquietudes europeas. Jamás España ha sido un Thibet ni podía serlo, aunque efectivamente hubiera sido un pueblo dominado por la fiebre mística, suposición refutada por el intenso realismo de sus artes y de su literatura y no menos que por el documento estético, por los testimonios abundantísimos tocantes a las costumbres, y por los espléndidos brotes de acción expansiva que llenan y decoran su historia, entre los cuales la conquista, población y españolización de América, basta y sobra para refutar esa philosophia hispanica, que cree el señor Cassou que llevamos en la masa de la sangre y que fundamentalmente consiste en la negación del mundo exterior.
II
Si los españoles fuésemos como M. Cassou nos pinta en su conferencia del Colegio de Francia se nos podría aplicar la frase: “cada inglés es una isla”. Cada español sería también una isla, rodeada de un mar sin límites. “Sería extraño decir del pueblo que ha producido los más grandes pintores de la historia — escribe el señor Cassou —, que es un pueblo para el cual no existe el mundo exterior. Mas se podría osar afirmarlo si no fuese más exacto sostener que nada existe para él. Nada es la palabra más española del idioma español.”
Nada no es nada, en cualquiera de los idiomas. Para demostrar ese nihilismo español, el señor Cassou, en un párrafo brillante, quiere acreditar con algunos ejemplos y algunas generalizaciones literarias, que el español, pronto a desprenderse de todo, estima que no hay cosa que no deba jugarse, arriesgarse o desafiarse. “El español juega el oro de sus Indias y la salvación del alma.” Don Juan aparece como testigo. Mas ¿fue concebido don Juan, desde Tirso, como un sujeto normal, como el espejo del carácter nacional? Otro testigo es el Segismundo de Calderón. Vivir un sueño o soñar la vida le parece indiferente, según el exégeta moderno. Indiferente, no, dudoso, y llega a la conclusión moral de que aunque soñemos, hay que proceder como si viviéramos.
No desconoce el señor Cassou nuestra literatura ni nuestras artes, y por no desconocerlas, le sale al paso la objeción del realismo. Trata de sortearla suponiendo que el desasimiento del mundo exterior aparece hasta en los más grandes realistas. “Los novelistas picarescos — dice — no pintan la realidad más que deformándola en brutales y soberbias caricaturas. Cuentan una travesía por la vida, que no demuestra nada ni conduce a nada, al revés de la prudencia y la experiencia que podemos recoger en las comedias de Moliere, en las fábulas de La Fontaine y en las novelas de Le Sage.” El ejemplo está mal escogido y llega a la temeridad en la cita de Le Sage. El autor del Gil Blas, muy empapado de la literatura picaresca española, lo que hace, en su obra más famosa, es un pastiche de aquella novela característica de España, reproducción tan exacta de tipos, de situaciones, de procedimientos y de espíritu, que se ha podido sostener, aunque la explicación carezca de fundamento histórico y haya sido desechada por una crítica más atenta, que era la traducción de un ignorado manuscrito español.
El realismo de la novela picaresca ni es una excepción en una literatura, marcada desde sus orígenes medioevales con un sello de robusto y sano realismo, ni tiene la deformación ni la intención caricatural que le atribuye el crítico francés. Una cosa es lo cómico y otra la caricatura. El pícaro no es una caricatura, sino una figura novelesca formada con elementos reales. No inventaron estos sujetos los autores literarios, sino que los tomaron de la sociedad en que vivían, de lo cual hay abundantes testimonios en la historia de las costumbres. Y no era el pícaro, en modo alguno, un sujeto que jugase con la vida por frenesí de indiferencia, sino que procuraba gozar de sus dulzuras y oportunidades, eludiendo trabajos y peligros. Espíritu aventurero, pero práctico, despliega toda la suma de esfuerzos que se necesita para vivir sin trabajar, rodea las dificultades, huye de los peligros y no hay personaje de Molière ni animal parlante de La Fontaine, que le aventaje en arte de prudencia y ciencia práctica del vivir, una vez admitida la hipótesis de su existencia irregular.
***
La interpretación de los grandes pintores no es menos arbitraria en la conferencia de M. Cassou. A Goya le presenta anegado en un vacío insondable, por las leyendas de sus dibujos. Al presentar la gloria en el Entierro del conde de Orgaz, del Greco, como una rectificación o una justificación del realismo de las figuras terrestres de los caballeros y los clérigos agrupados alrededor del cadáver, no tiene en cuenta el carácter del cuadro. Todavía es más extraña su manera de entender a Velazquez: “No hay en él voluptuosidad alguna de vivir. Ningún divino esplendor, ningún lirismo, como en los venecianos y en los flamencos, viene a realzar la reproducción de las cosas. Quiero imaginar que este hombre por una coquetería última de la raza que le produjo, no pintó con tan altiva mano el tiempo y el espacio, las princesas, los borrachos, los reyes con sus perros y los idiotas con sus sombras, más que para decirnos: ¿no es más que esto?”
Se le deslizó al crítico el verbo imaginar. En ese plano caben todos los fantasmas y todas las fantasías. Pero ¿es posible desconocer, dejándose de imaginaciones, la alegría báquica, el júbilo dionisíaco de Los borrachos, o ver en las altivas figuras del cuadro de las lanzas o en los retratos de Felipe IV y de Olivares, un pincel desdeñoso?
También es harto sumaria la manera que tiene M. Cassou de despachar el antiguo pleito de la ciencia española. Le falta poco para colocarse al nivel de M. Masson de Morvilliers[9]. Punto es éste que ha sido detenidamente tratado desde el siglo XVIII y en que han peleado frecuentemente dos opuestas exageraciones. Sin producir un Discurso del método, ni una Crítica de la razón pura, los españoles han producido otras cosas que no carecen de importancia. Doctos en el Derecho y la Teología, curiosos de todas las ciencias, los españoles no han podido sobresalir igualmente en todas las manifestaciones del saber y el ingenio, pues no se ha dado el caso del pueblo del milagro, que en todo se elevase a las cimas. La inevitable variedad de aptitudes y de oportunidades históricas para desarrollarlas, no autoriza conclusiones tan absolutas como la de horror a la ideocracia que aplicando una cita de Unamuno, sienta el señor Cassou. La misma observación que hace acerca del estilo conceptista de Quevedo y de Gracián, ¿no está mostrando el amor al juego de las ideas?
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Es que no se puede edificar una psicología colectiva sobre los textos de un corto número de escritores contemporáneos. El carácter de un pueblo se revela en hechos generales, no en excepciones. El magnífico y penetrante estudio de Unamuno sobre El sentimiento trágico de la Vida es, por ejemplo, un breviario personal, no el breviario de un pueblo, y no autoriza para pensar que España es un pueblo obsesionado por la contemplación de la muerte. El mismo Unamuno, ¿no tiene en su vasta y compleja enciclopedia de ideas y emociones, partes vitales y activas? Él mismo, partidario de la tragedia desnuda y de la novela esquemática, ¿no ha ofrecido en Paz en la guerra, intuiciones tan bellas y plásticas del mundo exterior?
Entregado a sus exageradas generalizaciones de1 pensamiento y la sensibilidad de un corto número de escritores contemporáneos, M. Cassou llega a perder el sentido de la proporción. “Sabidas son las proporciones gigantescas de la obra de un Lope, de un Calderón, y en nuestros días de un Gómez de la Serna”, escribe. Alude a la fecundidad. Mas Gómez de la Serna, que es hombre de buen juicio, no le agradecerá que le coloque en la posición embarazosa que supone el verse alineado de repente nada menos que a Lope y a Calderón.
COMENTARIO
Se supone que Gómez Baquero no conocía de Cassou apenas más de lo que le aportaba la lectura de su rúbrica del Mercure de France. Era suficiente para que lo aceptara como interlocutor e incluso le concediera cierta competencia para escribir sobre la literatura española del pasado. En cambio, se la negaba para la del presente, considerando que un extranjero no está en condiciones de apreciarla a su justo valor, al desconocer el contexto de su creación. Existe, en efecto, el riesgo de que no le llegue más que un eco lejano y deformado de su realidad. La alusión a “algunos escritores de moda o de su predilección” debe interpretarse, sin lugar a dudas, como una reserva hacia la opinión de Jorge Guillén: “esta tremenda y magnífica fatalidad de ser español”.
Aun si cupiera alguna duda sobre lo que motivó que E. Gómez Baquero dirigiera una respuesta a un texto que no le venía personalmente destinado, esta discreta alusión bastaría para disiparla. Queda claro que el crítico español quiere discrepar públicamente de algunas opiniones de J. Cassou.
El reproche principal concierne “las interpretaciones psicológicas sobre el carácter de un pueblo, sacadas de su literatura”.
No sin alguna malicia, reproduce juntándolas las palabras iniciales y las finales, que resumen, según él, el texto y, al mismo tiempo, revelan sus defectos mayores: “un exceso de subjetivismo y de lirismo”, así como una tendencia a ceder al formulismo en lugar de proponer explicaciones argumentadas.
Luego condensa en una sola frase las ideas principales expuestas por Cassou, no sin calificarlas de trasnochadas (“la especie no ciertamente nueva”), desde “el pueblo místico” hasta “la predisposición de cada sujeto a encerrarse sobre sí mismo”, pasando por un sentimiento exacerbado de la muerte, la indiferencia al mundo exterior, el desdén por lo sensible, el individualismo y la obsesión por la eternidad que, si bien produce algunas personalidades excepcionales, las condena a la indiferenciade la mayoría.
Este resumen fiel del contenido de la conferencia, parafraseado principalmente en vista a unos lectores que no dominan el francés, también orienta la interpretación de estos, en la medida en que la acumulación de afirmaciones no comentadas tiende a producir un sentimiento de rechazo.
Tampoco comparte Gómez Baquero la especificidad del hombre español en relación con su historia, porque el hecho de que la población fuera profundamente romanizada (tanto o más que la de los Galos, aunque no lo diga) y fuera capaz de conquistar un continente nuevo demuestran todo lo contrario. Asimismo, no acepta la definición de un realismo deformado hasta la caricatura en la novela picaresca.
Por lo demás, Gómez Baquero opta por la reproducción de abundantes citas, como si contara con la perspicacia de sus lectores españoles para desarmar la argumentación de Cassou, sin tener que entrar en detalles del texto. Sin embargo, se muestra más agresivo en ciertos puntos, lo que expresa por medio de un vocabulario cada vez más severo. Juzga arbitraria su interpretación de la literatura y de la pintura; califica de sumaria su visión de la ciencia; incluso lo sospecha de haberse quedado al nivel de manuales del siglo XVIII. Por fin, le reprocha basarse en ejemplos limitados, interpretados abusivamente, para justificar generalizaciones discutibles.
La última frase, a manera de flecha del Parto, sugiere a Cassou que se guarde de colocar al mismo nivel a Lope y Calderón y a algunos autores contemporáneos, de los que hace mucho caso, como Ramón Gómez de la Serna, al que cita más de una vez. Denunciar semejante confusión entre los gloriosos antiguos y sus pretendidos rivales actuales nunca falla su blanco.
Aquí termina la primera contestación a la conferencia de Jean Cassou. Se reanuda el intercambio a consecuencia de una respuesta que el francés dirigió al español por medio de la Revista de Occidente. El artículo, titulado “Carta a Andrenio”, inaugura el n° 40 (1926), p. 1-10. Transcribo el texto que me fue amablemente remitido por la Fundación José Ortega y Gasset-Gregorio Marañón.
Carta a “Andrenio”
Me reprocha usted, Andrenio, que doy una interpretación tan arbitraria de España, que usted mismo, según parece, tendría reparo en ser español tal como yo lo defino. Y usted se niega a reconocerse en esa imagen, trazada por mí, de una raza que, en parte, es la mía, y que creo tener la libertad de juzgar por lo que en ello hallo de mí mismo, como por lo que se me opone. Esta imagen le parece a usted de un romanticismo psicológico tan falso como el romanticismo pintoresco y abigarrado que fue moda aquí, en Francia, hace cien años. Usted y sus compatriotas no soportan ser tratados a golpes de lirismo. Es esta una manera de descubrir en ustedes algo fenomenal y monstruoso, que les choca tanto como si se vieran rebajados al rango de héroes de oda olímpica, de tema y motivo para sublimes especulaciones. Y, sin embargo, deberíamos – ustedes y nosotros – dar crédito a las perspectivas en que nos pueden colocar, y soportar el ser nada más que objeto; aceptar un puesto en la diversidad del mundo, y permitir que se destaque entre nuestros rasgos tal o cual función, tal virtud fecunda, tal aspecto.
A mi juicio, es preciso que España se resuelva a ser lo que es; y me aferro a la idea de que la virtud más grande de los grandes españoles, ha sido siempre una especie de resignación respecto a sí mismos. ¿Qué cosa más bella hubo nunca que Velázquez tal como se ha querido representar en La Meninas, pintando? Pintando, sin pretender asumir ningún otro oficio; pintando únicamente lo que a sus ojos brinda el azar de una entrada tumultuosa de princesa. Y la belleza de Don Quijote consiste en haberse obstinado con toda naturalidad en su demencia y haber sometido el mundo a ella, hasta el instante en que la Muerte vino a anunciar el fin del juego. ¡Qué arriesgados jugadores los españoles Vous êtes embarqués!, grita Pascal. El español no se sorprende de hallarse embarcado, y va allá donde el viento le empuja, a trueque de descubrir un continente.
En la psicología simple y ruda del español no hay ninguno de esos apaños y de esas autoilusiones que vienen en seguida a la mente en cuanto pronunciamos, por ejemplo, el nombre de Stendhal. Todo un mundo novelesco y vano – encantador, desde luego – surge entonces, que nos hace imaginar que el hombre pudiera asimilarse a otra cosa y aspirar a una semejanza. El heroísmo español es completamente distinto; únicamente se cuida – aunque sin parecer cuidarse de nada – de asemejarse a sí mismo.
Sé que muchos espíritus de la España actual pretenden sacudir esta túnica de Nesso, esta singularidad a que les condena su nacimiento. ¿Hay nada más fatigoso que ser singular?* Nada les halagaría tanto, sin duda, como se les llamase europeos, a condición de que por tal se entienda una especie de término medio – tras el “francés medio”, tendremos algún día en “europeo medio” – en que se fundan las cualidades más amables y admitidas de ingleses, alemanes, franceses, italianos. Es que comienzan a forjarse del progreso y de la civilización una idea idéntica a la nuestra, y que un demonio adulador y sutil les incita a querer figurar, a su vez, en este tío vivo que pomposamente llamamos la Historia.
*
La raza francesa posee un don precioso y mortal: el don de análisis y abstracción.
Desde el día en que Descartes pronunció su cogito, se arrumbó toda realidad, el alma se separó del cuerpo** y la razón de las demás facultades de espíritu. Ya no hubo más que disyunción. El arte dejó de ser prolongación de lo que hay de más íntimo a lo que hay de más particular en el ser, y convirtióse en una temática trascendental a cuyo plano fueron elevadas ciertas combinaciones de sombras, apariencias y figuras. Nada puede subsistir sin haber sido antes rehabilitado, vestido, medido, tasado. Mientras se establecían esas transformaciones en el espíritu, modelábase la sociedad sobre ellas y se forjaba también sus convenciones. De esta suerte, formaba Francia su historia: una conciencia continua que cada generación tiene a honra desarrollar. El francés, taimado de nacimiento, y, sobre todo, analista nato, disociaba de la parte destinada al olvido los únicos acontecimientos dignos de perdurar en la memoria, para construir así una especia de novela colectiva, compuesta de anécdotas, elocuencia y esa pedagogía ingenua tomada a la charlatanería de los romanos, y, sin embargo, tan potente, que hoy día, el joven formado en esta disciplina no puede escapar a la tentación de entrar, a su vez, en el juego. La manía histórica ha producido el snobismo, el bovarysmo, mil dolencias espirituales. El atacado de ella desde su juventud ofrecerá sus muñecas a las cadenas del tiempo, de la misma manera que el jugador, no encontrando bastantes luchas y obstáculos en la vida real, se somete resueltamente, con los ojos vendados, a la férula del azar. El enfermo grita: “¡Todavía el tiempo no me domina bastante! ¡Todavía no me siento bastante limitado!”. Y por medio de caer en no se sabe qué agorafobia, se ata al tiempo donde ha tenido la suerte o la desgracia de nacer, se sostiene en él y marca en él su puesto. Él sabe – se le ha enseñado muy bien – qué reacciones siguen a tales acciones y que siempre un romanticismo viene a oponerse a un clasicismo. A él le incumbe descubrir en qué momento de la partida ha llegado. Sabe que el año pasado todos los pianos ponían sordina: esta estación les mandará poner el pedal fuerte, y en la siguiente, ningún pedal.
Su mayor preocupación son los demás, y no su propio yo; la imagen que los demás se forjen de él, bajo la cual perdurará en su recuerdo, es decir, en sus manuales. Así también, ¡con qué volubilidad se explica! ¡Cómo procura convencerles, es decir, ponerse de acuerdo con ellos! Y para no chocarles, ponerse de acuerdo con los personajes que ya están en su espíritu! O, al contrario, si quiere apoderarse de su público por la sorpresa, oponerse a los ejemplos del siglo precedente, con tanta simetría, sin embargo, que el gusto por el orden sale halagado una vez más; la razón, satisfecha, y la república, garantida.
El error de todo individuo nacido en Francia ha sido, una vez separado lo individual de lo colectivo, conceder la mayor importancia a esos movimientos continuos y artificiales que llama “el progreso”, según el cual la monarquía francesa ha fraguado la unidad de las provincias francesas para desaparecer, cediendo el puesto a la burguesía francesa, que, a su vez, no ha dejado de desarrollarse y redondearse lógicamente, indefectiblemente, memoralmente. Fue también un profesor francés quien, en el dominio del arte, queriendo elevar las disciplinas del espíritu a la altura de un cuadro tan admirablemente compuesto, inventó la teoría de la evolución de los géneros. Por otra parte, basta emplear este instrumento crítico, tan maravillosamente aguzado que sería lástima – siempre que se conozcan sus límites – no utilizarlo, para advertir hasta qué punto puede considerarse la pintura o la poesía francesa como una sucesión de pacientes esfuerzos, cada uno más avanzado que el anterior.
Nada impide que se introduzca ese punto de vista mecánico en el estudio de las cosas españolas; nada hay imposible para la inteligencia crítica. Mas si me complazco en ver los poetas y los pintores franceses como una serie de admirables individualidades fraternales, que, unidas por encima del tiempo, conducen la misma luz, como los Faros de Baudelaire, con mayor razón me sería fácil ver en España esa parte del espacio que se ha quedado en espacio, inconmensurable con las medidas del tiempo histórico y social. Yo pretendo ver en España una doctrina que nada ni nadie ha logrado menoscabar, y que cada genio español vuelve a afirmar con la misma fortuna. Goya reproduce a Velázquez, sin que se pueda descontar nada por concepto de degradación de energía, ni sumar tampoco por razón de un ilusorio progreso. España es tan integral en Goya como en Velázquez, tan visible, tan potente. En uno y otro la confesión es la misma. El tiempo y la historia no han carcomido nada; han girado en el vacío.
Ni los salones ni el siglo pueden nada en España. El español está situado fuera del siglo. La perennidad geográfica ha dominado en él a la historia transeunte. Yo pienso en el carácter africano, planetario, que el conde de Keyserling[10] atribuía, en estas mismas páginas, al paisaje español.
Los franceses no hacemos nada que no tenga la mácula de la política. Somos urbanos y civiles en todos los sentidos de estas palabras. Cada uno de nuestros actos, cada una de nuestras creaciones responde a alguna intención estratégica. Siempre forman parte de algún mecanismo, de alguna combinación. ¿En qué piensan nuestros héroes de novela, sino en penetrar en tal salón, en tal mundo hermético? “París: ahora nos las veremos tú y yo![11]” El grito de Rastignac resuena también en Stendhal, en Proust. Los mismos resortes sutiles, mundanos – hechos de vanidad y artificio – llevaron a una perfección singular el siglo de Luis XIV. A la luz de esos nimios motivos de vivir, La Rochefoucaud y Saint Simon despertaron y analizaron el corazón del hombre. El ritmo de nuestra vida literaria se desarrolla sobre una combinación de escuelas, gacetas, capillitas. En suma: política.
Para las necesidades de las causas, hemos inventado hombres, fetiches con algo de ídolo y de principio universal – antaño Aristóteles, ayer Sant Tomás o Auguste Comte, otro día Carlos Marx -. Porque esta causa tiene sus necesidades: en el sentido lógico, la de desarrollarse en consecuencias; en el sentido político, la de reclutar prosélitos. (Algunos, que son franceses a contrapelo – pero franceses en definitiva -, han llegado a enrolar y organizar hasta la desesperación). Lógica y política: los dos virus del espíritu francés.
Pero en España, si un movimiento intelectual se inicia – partiendo de preocupaciones políticas – en realidad siempre se trata de otra cosa. Pareció que en el movimiento de 1898 se entremetían cuidados de este orden; en realidad, nació de la indignación que los artistas, conscientes de su depósito – la doctrina española -, sentían al ver la vida civil de su raza desarrollarse con un carácter extraño por completo a esta doctrina. Es que esta es una cosa rara, elevada y hermética, y que España es un país de contrastes. En vano se desarrolla allí la historia, en vano prosigue el tiempo su vano circuito e instala el siglo sus hueros clamores; la geografía perdura; el paisaje, el cielo, la tierra, conservan su desnudez, su invariable costra, y la doctrina, su inaccesibilidad.
España es estática. Desde el primer instante ha alcanzado su norma, constituído su soledad, desplegado su energía. Ésta adopta su forma, según un tempo imprevisible, que permanece en el misterio, como las razones y las fuentes del genio. Todo reproche es inútil, inútil toda interrogación. Pero, en tanto que los demás pueblos obedecen a esta ridícula fatalidad llamada civilización, a esta sucesión constante y vertiginosa de motivos y móviles, de imitaciones de toda suerte, abstracciones inventadas a placer, de leyes de que no podrían prescindir, so pena de perecer; en tanto que buscan en la inane máquina de la historia un pretexto para subsistir. España perdura sin necesidad de tanto contrafuertes y puntales, y persevera en su ser, a la manera de una fuerza natural que todavía no ha surgido domar. España es, está; no se podrá utilizarla sino en la medida en que se la deje ser, estar, sin obligarla a evolucionar y devenir.
Su oposición y su diferencia se manifiestan, precisamente, en su incapacidad de evolución, en su debilidad histórica, en el caos y la incoherencia de su existencia política y material. Pero no sin pérdida ha podido limitarse hasta ahora al ingrato papel de conservadora única del Espíritu, de bastión supremo de los valores morales. España padece por su aislamiento, padece por tantas contradicciones. Pero ¡qué agradablemente suenan en mis oídos estos gritos de sufrimiento!
Mas estos gritos se trocarán en alaridos, si se deduce que los españoles son bárbaros. Bárbaros: así se llamaba a los extranjeros, y los españoles son extranjeros. Bárbaros son también los pueblos que han permanecido al margen de la historia, sin sentarse a la gran mesa de juego, y que toda pedagogía bien entendida cuida de dejar en las tinieblas. La función de la pedagogía es formar ciudadanos útiles al Estado, que reconozcan y sirvan el sistema que les va a ser impuesto, que acrezcan la virtud de los signos bajo cuya conjunción fueron concebidos. ¿Qué pedagogo patentado por la sociedad se arriesgará a poner a los rapaces que adoctrine el ejemplo de España? España no es un valor comercial.
El comercio de los hombres sólo tiene en cuenta lo que le sostiene y alimenta. Nacido de sus artificios para sostenerse. Es una máquina que debe estar bien engrasada. Estos son negocios del mundo. El español no conoce parientes ni vecinos. Solo en el mundo, no ha pensado más que en aventurarse en esa empresa inaudita de un diálogo del hombre con Dios.
Por esta razón su paisaje, su arte, su literatura, son significativos y hablan un lenguaje que es preciso entender. Mientras la historia del mundo prosigue su curso, España es el testimonio vivo de la esencia del hombre, de esa organización suprema, enjuta, única y libre, que marcha erecta sobre el suelo, compuesta de huesos y arcilla, y que ya paladea anticipadamente la idea de ser ceniza un día. Y a grandes testeradas, duras y caprichosas, repite su testimonio; nada más que esto. España afirma perpetuamente aquello que no podemos cambiar – aunque pusiéramos en ello toda nuestra maña -; aquello por encima de lo cual no hemos logrado elevarnos todavía, ni por medio de nuestros libros, ni por medio de nuestros conciertos e instituciones, ni por modas, ni por cánones, ni, en suma, por cuanto podemos añadir a nuestro organismo: motores, alas, cuellos postizos, principios. España afirma, se obstina en afirmar ese único esfuerzo, gracias al cual hemos dejado de ser monos, gracias al cual tal vez lleguemos a ángeles; en fin: nuestro estado primero, nuestro contacto con la tierra, nuestra desnudez, nuestra esencia biológica. La verdad.
Juan Cassou
COMENTARIO
No es indiferente que la “Carta a Andrenio” fuera aceptada por la Revista de Occidente y apareciera en lugar tan favorecido como las primeras páginas de un número. La nueva generación de escritores encuentra en la revista, creada tres años antes por José Ortega y Gasset, una acogida favorable. Ramón Gómez de la Serna es uno de sus más asiduos colaboradores; en cambio, Gómez Baquero no publicó ningún artículo en ella. Sus páginas ofrecen la oportunidad a escritores noveles de intervenir en debates mantenidos con otros grupos de literatos, la que a todas luces quiso aprovechar Jean Cassou. La seguridad de que sus ideas serían acogidas con simpatía le anhelaba a expresarse sin sentirse cohibido ante un crítico afamado y explica la tonalidad de conjunto más propia de un manifiesto que de un debate.
Confirma esa impresión el primer párrafo de la carta, en el que, a pesar de que los argumentos que expone desde el principio se derivan de una visión de la intelectualidad española notablemente alejada del tema de su conferencia, se dirige personalmente a su interlocutor en un tono tan directo que no logra ocultar un fondo de agresividad. Tampoco aparece claramente lo que, en la respuesta de Gómez Baquero, pudo justificar semejante acometida. Lo que importa es resaltar que “muchos espíritus de la España actual”, de los que forma parte Gómez Baquero, los cuales pretenden negar la singularidad española, están en conflicto abierto con los que pretenden asumirla, entre los que se sitúa Cassou.
Tan seguro está de ser entendido por los destinatarios de su carta, que se expresa de manera descuidada, creando una confusión entre el emisor del mensaje y su receptor. ¿Cómo interpretar: “Es esta una manera de descubrir en ustedes algo fenomenal y monstruoso que les choca”? ¿Se le puede reprochar a alguien que se escandalice de que le achaquen semejantes defectos? ¿Esta era realmente la intención de Cassou o, al contrario, una interpretación errónea de lo que había escrito? Por otra parte, cuesta trabajo identificar el sujeto (en plural) del verbo en “las perspectivas en que nos pueden colocar”.
Cassou se apropia el tema de tal manera que coloca al crítico español en la situación ciertamente poco halagadora del que se resiste a aceptar la realidad y merece ser aleccionado.
Sin que venga demasiado a cuento, a continuación, inserta un largo desarrollo sobre lo que, según él, caracteriza la mentalidad francesa, su “don de análisis y abstracción”, en el que cuesta trabajo entender lo que rechaza y lo que aprueba. El objeto aparente de ese ex cursus consiste en sentar el concepto de “doctrina”, ya referido en la conferencia, más allá de las contingencias de una actualidad, de los fenómenos de moda, de todo lo que contribuye a unificar a los individuos dentro de una sociedad ordenada según cánones precisos. La clave de la “doctrina española” reside en su geografía, no compartida con ningún otro pueblo vecino o lejano, y en su “inaccesibilidad”, palabra que habrá que entender como una capacidad de resistencia a cualquier influencia y cualquier intento por normalizarla.
Sobre la base de una “doctrina” tan evanescente aplicada a Francia, Cassou se propone caracterizar la que corresponde a España. Lo hace mediante fórmulas perentorias que, interpretadas literalmente, rinden un escaso favor a la cultura hispánica. Una cosa es afirmar que “España es estática”, que es incapaz de evolucionar y otra que “perdura” “y persevera en su ser”. Más que una explicación, es una acumulación de lemas, ciertamente difundidos, pero que resisten mal a un análisis semántico.
Lo que más sorprende al lector de hoy, que conoce el compromiso posterior de Cassou por ciertos valores que pusieron su vida en peligro bajo el régimen de Vichy y la ocupación nazi, es el uso que hace de un vocabulario y de unas metáforas más adaptados a un contexto religioso que a los valores de una sociedad, que se caracterizara por una libertad de pensamiento y de palabras y por el rechazo de cualquier sujeción a una ideología basada en el inmovilismo y la obediencia ciega a valores impuestos.
SEGUNDA RESPUESTA DE E. GÓMEZ BAQUERO
España como valor espiritual.
Más sobre la España de M. Jean Cassou
No debo dejar sin respuesta la carta que M. Jean Cassou me dirige desde la Revista de Occidente. El acuse de recibo está impuesto por la cortesía, no por necesidades de polémica, puesto que M. Cassou no discute mis objeciones y se limita a ratificarse en su imagen o representación de España.
Ya he dicho que el señor Cassou no es un detractor de España, sino un apologista. Sería absurdo catalogarle entre los cultivadores de la leyenda negra. Mas hay apologías que son otra especie de leyenda, dorada si se quiere, atractiva a primera vista, como una imagen de libro de horas, pero inquietante para el que entienda y desee pertenecer a un pueblo vivo y no a un monumento histórico. Tampoco M. Jean Cassou está ayuno de noticias españolas como el conde de Keyserling, por ejemplo. Domina nuestro idioma, como lo acredita su excelente traducción de un texto difícil por lo personal del estilo, la riqueza léxica y la hondura del pensamiento) cual es L’Agonie du Christianisme, de Miguel de Unamuno.
A mi parecer, el error de la imagen o interpretación de España de M. Cassou no depende de falta de documentación. Es un error poético o una ficción poética. Su Philosophia hispanica pertenece al reino de la lírica y de la imaginación más que al dominio de la observación histórica y práctica. Hoy, la mayor parte de la lírica se escribe en prosa, y, en lugar de ostentar los títulos clásicos de oda o de elegía, se decora con el nuevo nombre de ensayo o con el grave título de Filosofía.
No todo es imaginación en la pintura de M. Jean Cassou. Más que inventar, generaliza. La generalización y la metáfora son los grandes peligros de las disquisiciones de moda acerca de la psicología de los pueblos, que siguen los pasos de la antigua Filosofía de la Historia, a la que calificaba con gracia don Juan Valera de arte de profetizar lo pasado.
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Es muy probable que M. Cassou, influido por la lectura de algún escritor genial, v. gr.: Unamuno, y por la seducción literaria del asunto, haya concebido su imagen de España como un pueblo excepcional y único, extático, ajeno al mundo del fenómeno, diferente de los demás pueblos de la tierra, generalizando lo singular y erigiendo en regla lo raro.
La psicología de los pueblos es muy difícil y más complicada de estudiar que la de los individuos. Investiga el carácter, lo diferencial. Busca lo mismo que persigue el retrato psicológico de una persona individual. Mas el carácter de un pueblo es un universal, una abstracción, un término medio de las cualidades individuales. Así como en el individuo el matiz singular del carácter no pesa más que las condiciones generales de la naturaleza humana, sino que es un elemento menor, en los pueblos lo original del carácter es también el elemento menor, la última diferencia, respecto al conjunto de las circunstancias generales que se dan en un tipo de civilización y una etapa de la historia humana. A mi parecer, no sólo no es España ese pueblo místico, consagrado al diálogo con Dios y hasta nouménico, expresión de la esencia humana, donde lo fenomenal está reducido al mínimo y apenas tiene valor, sino que no ha existido nunca, ni es verosímil que jamás llegue a existir un pueblo tan extraordinario.
Así como para comprender el carácter de un individuo nos guiamos por sus hechos y sus palabras, para averiguar el de un pueblo, los datos con que contamos son los que nos ofrecen su historia y las manifestaciones de su espíritu: literatura, artes, especulaciones, creencias, folklore, instituciones y costumbres. Hay que precaverse del error de tomar como medida de la condición y del carácter del pueblo a los individuos excepcionales o a los hechos extraordinarios de su historia. Lo característico es lo diferencial dentro de lo común, no lo raro en el sujeto.
No formaríamos juicio exacto del carácter de un individuo si le indujéramos de un momento de momentánea y rara exaltación, de perturbación patológica, de embriaguez o de accidente nervioso. Al individuo hay que juzgarle por lo que es constantemente, por lo que ha sido ayer, por lo que será mañana, fuera del instante raro de alteración accidental. Lo mismo a los pueblos.
No extrañe M. Cassou que a algunos españoles no nos ilusione la idea de España como un pueblo absolutamente original, solitario o extravagante en la historia y en la manera de ser de las naciones, especie de Israel de la contemplación y del desasimiento de la vida material.
Desde el punto de vista artístico es una representación muy lisonjera, un gran papel en el escenario del mundo; pero es el papel de un fantasma, y los fantasmas no nos convencen en la vida y pocas veces en el teatro. Un pueblo así sería un yogui o un estilita, singularidad que sólo se puede presentar en individuos muy raros, y no en comunidades extensas. Estaría preparado para que la Sociedad de las Naciones le declarara monumento nacional o monumento público, como parece que se pensó hacer por algunos con una ciudad histórica, que no está deshabitada, sino poblada por seres vivientes que comen y beben, visten y calzan, aman, odian, trabajan, se entretienen y se aburren, participan, en fin, de los afanes y menesteres de la vida.
Los discrepantes del retrato místico declinamos el honor de ser sombras de un Museo; nos contentamos con formar parte de una sociedad viva, que tiene su fisonomía como todos los pueblos, pero no es de naturaleza diferente: que ni ha vivido en una Tebaida contemplativa, ni queremos que se encierre en el Panteón de El Escorial.
El retrato imaginado
Muy lejos estoy de incluir la imagen de España de M. Jean Cassou en la categoría de lo que se llama la España de pandereta. La España de pandereta no es una caricatura; es un cromo, una representación chillona, tosca y antiartística, que en vez de estilizar, degrada las partes de realidad que tienen sus figuras. La interpretación de M. Jean Cassou, a mi entender, es lo contrario. Es un exceso de estilización artística, una criatura del arte, un dibujo romántico.
No dudo que así como hay discrepantes, entre los que me cuento, habrá españoles a quienes lisonjee esa imagen como un blasón, o como una flámula de grandeza. Ser único es cosa muy tentadora. Cada individuo se siente único, y en algún sentido tiene razón: el mundo es su representación. Este sentimiento se traslada a los pueblos, no por espontáneo movimiento de la conciencia colectiva, sino por la sugestión de los individuos superiores, por la acción del pensador o el estadista que extiende al pueblo de que forma parte, aquel sentimiento egocéntrico de la personalidad individual. Así se forma la idea de los pueblos elegidos y la creencia antiecuménica o anticatólica, profesada frecuentemente por pueblos católicos en ocasión de sus guerras, de que Dios ha de proteger y preferir a un pueblo a expensas de los otros. Durante la última gran guerra, ministros de las diferentes confesiones cristianas y aun de una misma Iglesia, pedían a su Sabaoth la victoria para los suyos, sin comprender que Sabaoth no podía complacer en tan encontradas pretensiones a sus fieles, y tenía que abstenerse. Era aquél un sentimiento israelita, de pueblo elegido, aunque lo manifestasen cristianos.
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M. Cassou nos considera como unos ilustres y gloriosos bárbaros, diferentes de “los demás pueblos que obedecen a esa ridícula fatalidad llamada civilización”. Lo dice sin ironía. Bárbaros en sentido de extranjería, como llamaban los griegos a los pueblos que pronunciaban mal su lengua, no en concepto depresivo. Para M. Cassou somos como unos virtuosos hiperbóreos, o macrobios, uno de aquellos pueblos excepcionales y felices que imaginaron los antiguos.
“El español está fuera del siglo (es decir, del tiempo). España es estática. Desde el primer instante ha conseguido su norma… Es la conservadora del espíritu, el bastión de los valores morales… El español, solo en el mundo, no conoce parientes ni vecinos… Es el testimonio vivo de la esencia del hombre…” Estas expresiones literarias de la carta con que M. Cassou me favorece, indican que no nos desprecia, sino nos admira.
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Por poco atento que esté un español al espectáculo de la vida social que se desarrolla en torno suyo, no se reconocerá en esa imagen. Eso de que cada español es un Quijote o un místico, puede servir como imagen lírica o tópico oratorio, pero todos sabemos a qué atenernos. Viene a las mientes la frase de Cánovas respecto a la sobriedad de los españoles: “¿Sobrios? Convídelos usted a comer y verá.”
Ni hemos de creer que la decadencia nos ha degradado de lo que fuimos y nos ha vuelto una imitación de los otros pueblos europeos. La historia política, de la civilización y de las costumbres, dice con multitud de testimonios y señales, que no hemos vivido fuera del siglo ni hemos sido impermeables a las influencias: que hemos experimentado intensamente el amor a lo sensible y los impulsos de la vida material, y que no hemos sido incapaces para la acción y la práctica. En el mismo número de la Revista de Occidente en que aparece la carta de M. Cassou hay una nota acerca del nuevo libro de Schulten sobre Sertorio. El nombre de Sertorio nos habla de la romanización de España, tan profunda que dio origen entre nosotros a una variedad o escuela de la literatura latina de la decadencia; que hizo prevalecer en el período gótico al elemento hispanorromano y le mantuvo y le sacó a flote entre las influencias orientales y africanas traídas por la invasión musulmana. No sólo conservaron los mozárabes su tradición latina, sino que la extendieron. En el califato y en los reinos de taifas abundó el moro latinado.
Después se abre España a la influencia francesa o europea que le traen los monjes de Cluny y sustituye a los usos mozárabes y la herencia gótica. Se franquea a las modas, a las costumbres, a las influencias de las grandes literaturas. Fuera del período, de un siglo aproximadamente, en que la exacerbación de la intransigencia religiosa nos tuvo en clausura, o acordonados para evitar el contagio de la herejía, España no ha vivido fuera del mundo, sino dentro de él.
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El realismo español, que no se encierra en la novela picaresca, en la cual ve M. Cassou temerariamente una caricatura, acusa vigorosos apetitos vitales, complacencia sensual en los placeres de la vida material y una visión muy clara de lo externo. No es una excepción, ni una actitud artística. Recorre todo el proceso literario. Le vemos lo mismo en el Arcipreste de Hita, que en Cristóbal de Castillejo, que en los grandes novelistas del siglo XLX. Se nos ofrece en el Quijote, no sólo en Sancho como figura de contraste sino en el cuadro viviente de la sociedad española, que hace resaltar la extrañeza de la figura del hidalgo enajenado. El refranero, impregnado de ese realismo, y los demás testimonios de las costumbres indican que no era puramente literario o artístico (la pintura y la escultura también lo manifiestan extremadamente), sino un sentido general de la vida. Es un hecho más hondo, más constante y de mayor volumen que la mística y la ascética. Aún en ellas influye. Santa Teresa, nuestra principal figura mística: ¿no dice que Dios anda también entre los pucheros, y no anima a sus monjas a sentir una sana e inocente alegría?
La capacidad española para la acción y para la práctica se reveló de un modo eminente en la conquista y civilización de América, obra de audaces empresas particulares de hidalgos y aventureros hambrientos que no eran sobrios, sino que querían hartarse de los placeres del mundo, ser ricos, señores, marqueses, lo cual podía conseguirse en las Indias, mejor que en Flandes o en Italia, con la pica o el arcabuz. Aquellos hombres no eran Quijotes que se lanzaban a conquistar imperios por el placer de la aventura. Sus hazañas bélicas son menos sorprendentes que su capacidad de fundadores y organizadores de pueblos. Improvisaron sociedades nuevas. Bernal Díaz del Castillo, después de referir la conquista de Méjico, cuenta al final de su historia cómo a los pocos años del dominio de los españoles se habían extendido las artes y las industrias de España entre los indios, cómo se había organizado la vida civil, y empezaba a formarse una España ultramarina, lo cual es la mejor parte de aquella gesta.
La imagen poética de España, trágica o pintoresca y colorista — Greco y Valdés Leal o Goya —, cadáveres, monjes y caballeros vestidos de negro, o manolos de desgarrados ademanes y vistosa indumentaria, se formó o cristalizó en la época del romanticismo. Entraron en ella las dramáticas figuras que habían quedado muy grabadas en la retina o en la imaginación de Europa desde la época en que fue España el adalid, el ministro y el ejecutor de altas obras de la unidad católica. Entró también el colorido popular de las costumbres, contempladas por el viajero ilusionado, goloso de impresiones extrañas. Esta imagen tiene ciertos valores artísticos, cuando no degenera en caricatura; pero no es un retrato histórico ni actual.
¿Dónde está España?
La correspondencia entre M. Cassou y un servidor de ustedes podría prolongarse indefinidamente. Llenaríamos los tomos de un vasto epistolario sin que llegásemos a convencernos el uno al otro ni a consumir los argumentos. Ciertos tópicos son inagotables. Discutimos sobre una cuestión que parece de hecho, que es de hecho, ¿cómo es España? ¿Cómo ha sido España? Mas la historia pasada y presente es un arsenal de argumentos contradictorios por la multiplicidad y la complejidad de los fenómenos de que se compone.
Por otra parte, los hechos históricos se trasfiguran al través de la sensibilidad del que los contempla. Hay quien juzga — no digo que M. Cassou participe de esta aberración — que el Santo Oficio fue una institución admirable, simpática y filantrópica. Todavía no ha perdido actualidad el comentario sarcástico de Moratín en sus notas al auto de Logroño. Un gran ingenio como Menéndez Pelayo, tan abierto a la cultura y al amor a la belleza, llevado de sus ardores de apologista novel, no vaciló en declararse en los años mozos defensor de la Inquisición. Llegó a maltratar despiadadamente a las víctimas en aquella obra de juventud, tan brillante en el estilo, inflamada en fuego polémico, la Historia de los Heterodoxos, a la que él mismo, con un acto de probidad intelectual lleno de nobleza, aplicó la crítica serena de la madurez, al publicar la segunda edición, por tantos años aplazada.
Allí, al hablar de don Luis de Usoz, el benemérito editor de los protestantes españoles, le supone animado de las “mismas feroces pasiones que acompañaron hasta la hoguera al bachiller Herrezuelo, a Julianillo Hernández y a don Carlos de Sessé.” (sic)[12]. Los feroces eran los quemados y no los tostadores de carne humana, con la hipocresía de la entrega al brazo secular. No comprendía que los protestantes españoles sacrificados por su fe eran mártires tan dignos de respeto, y algunos de admiración por la heroica constancia en su creencia, como los otros mártires que padecieron bajo los Cesares perseguidores y que han pasado al Martirologio Romano.
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La controversia con el señor Cassou, nunca tendría acritud porque ambos profesamos respeto a las buenas maneras literarias, y porque creo que nos unen simpatías, aparte las diferencias; pero será forzoso que esta discusión tenga término alguna vez. No llegaremos a la demostración, porque sobre la cuestión de hecho hay una cuestión de sensibilidad y simpatía: Misticismo o naturalismo, muerte o vida; cada uno hemos hecho nuestra elección afectiva e intelectual. El más incansable coleccionador de papeletas no acabará nunca de catalogar los argumentos o las variaciones de uno y otro argumento. Pero, en fin, sigamos hablando, aunque sea por mi parte, para afirmar una vez más cómo estoy más conforme con el Cassou de las delicadas Harmonies viennoises[13] que con el Cassou de la España mística y espectral.
Si España no está donde yo la cojo – dice Monsieur Cassou -, es decir en los tipos extremos que ha producido, en Cervantes y en Goya, en San Ignacio y Santa Teresa, en Góngora y Gracián, ¿en dónde está España? ¿Y cree usted que en el Panteón de El Escorial respiraría menos a gusto que en las academias y en los ministerios?[14]
Vamos por partes. Las academias y los ministerios, aunque me honre en pertenecer a una de aquéllas, probablemente tienen más relación con la España de Cassou que con la mía, por el peso tradicional y por la tendencia conservadora, que inclinan, si no a vivir en el yermo, ni a dedicarse a los deliquios místicos, a simpatizar con estas imágenes.
Cervantes no es argumento para M. Cassou. Cervantes está empapado de erasmismo de humanismo renacentista; es el ingenio hispano más moderno, más europeo, más universal, al mismo tiempo que el más español; el más tolerante, el menos dado a la crueldad, el que mejor supo saborear la divina ironía. No era necesario el erudito libro de Américo Castro para demostrarlo, aunque esta noble monografía establezca las precisiones críticas.
Goya…, ¿qué Goya? ¿El de las majas y el de los retratos, tan llenos de realidad, o el de los caprichos, en cuyas visiones alucinadoras hay, tal vez, una oculta moralidad sarcástica? ¿Y por qué ha de estar España en Ignacio de Loyola, creador de una milicia eclesiástica internacional, mejor que en Fray Luis de León, y Fray Luis de Granada, y el padre Mariana? Y ¿por qué Góngora – que no era nada místico y que se disculpaba de sus devaneos, diciendo que por ser tan poco teólogo había preferido ser mundano a hereje -, por qué en Góngora mejor que en Lope, tan dionosíaco, tan lleno de fuerza vital? ¿Y por qué Gracián, nada místico tampoco, intelectualista, crítico sutil y penetrante, mejor que en Quevedo?
Y ¿por qué no ha de estar también en el Arcipreste de Hita; en el Cid, que muestra a Jimena cómo se gana el pan a botes de lanza, y toma a Alfonso el juramento de Santa Gadea; en la ardiente y agitada Castilla medioeval, que fase los omes e los gasta; en los comuneros; en los conquistadores de América; en los poetas sensuales y regocijados como Cristóbal d Castillejo; en toda la inmensa expansión de fuerza y de apetencia vital, sembrada en la historia y que no pudo ahogar el tétrico sayal del fanatismo? Mala vestidura para retratar a España, peor Que las galas anticuadas de El retrato de golilla, breve joyita satírica, entre las fábulas de Iriarte, otro español, ni fanático ni místico.
¿Está Francia encerrada en Abelardo, en Gerson, en Pascal, en los señores de Port-Royal, en madama Guyon? Fueron, sin duda, figuras eminentes; pero en Francia hay más. Lo mismo en España. Un gran pueblo no se reduce a una escuela ni a un solo color.
COMENTARIO
Si fuera exacto, como lo pretende E. Gómez Baquero, que la “Carta a Andrenio” no añade nada al contenido de la conferencia, lo lógico hubiera sido que pusiera fin al intercambio. Por el contrario, su segunda respuesta es más densa que la primera y, desde luego, mucho más extensa que la carta de Cassou, lo que es indicio de que el debate había alcanzado una dimensión pública, y le obligaba, dada su posición en los círculos literarios españoles, responder con especial atención. No es casualidad si su texto viene dividido en dos partes encabezadas por subtítulos (“El retrato imaginado”, “¿Dónde está España?”), y si incluye apartados señalados por asteriscos, que muy bien podrían señalar varias etapas en la redacción. Esta presentación deriva de una redacción fragmentada más que de una voluntad de lógica expositiva y sugiere también la posibilidad de que Cassou mandara otra carta, personal ésta, a la que contestaría el final de “¿Dónde está España?”.
En su primera respuesta, Gómez Baquero había optado por someter a sus lectores españoles largos extractos comentados de la conferencia. Ahora usa de un método más directo y más radical y no duda en exponer directamente su punto de vista, contestando por partes a los argumentos de su corresponsal. El contraste que forma su estilo con él de Cassou es ya de por sí una manera de oponerse a él. No se resiste tampoco a insertar algunos rasgos de una fina ironía que, sin sobrepasar los límites de la cortesía, colocan a su interlocutor en situación poco favorable. El que los inserte en los párrafos introductorios de cada subparte confiere a su autor una autoridad de hecho que se dejará sentir en la argumentación propiamente dicha.
La tonalidad general se asemeja mucho a la del comentario del maestro a la exposición de su alumno, en la que no se limita a denunciar los errores cometidos por el ponente, sino que procura explicarle a qué se deben, desmontando su metodología deficiente o sus prejuicios. Es una técnica eficaz, en la medida en que pone el acento en las contradicciones internas a la opinión expuesta, mientras que el crítico se ahorra tener que explayarse demasiado sobre las suyas propias. Gómez Baquero se muestra parco en exponer su propia opinión, pero esta se puede deducir de algunas de las informaciones contenidas en la subparte “Dónde está España”.
En ellas, sin embargo, deja constancia de que no se adhiere a algunas concepciones retrógradas, incluso las que profesan instituciones como la academia, a la que acaba de ser elegido, y realza los episodios históricos que se oponen a la idea de una España estática (profunda romanización romana, colonización de las Américas). Igualmente, denuncia la pretendida falta en de algunas de las corrientes literarias más creativas, como el realismo.
CONCLUSIÓN
No cabe duda de que a Eduardo Gómez Baquero le irritó leer en una revista francesa prestigiosa la “doctrina” de Jean Cassou, como lo demuestra de sobras el que tomara la pluma para combatirla. Quizás se sintiera obligado, por su estatuto entre los críticos españoles, de hacerse el portavoz de una mayoría de ellos que no compartía tan radical concepto de la vida literaria y cultural española del momento. También es posible que haya querido aprovechar la oportunidad de oponerse a un discurso que estaba recibiendo un eco favorable por parte de la intelectualidad, en torno a la Revista de Occidente.
Debo confesar que me alegré cuando descubrí los textos de Gómez Baquero, porque no me había convencido la lectura de la conferencia de Jean Cassou, sino que a mí también me había irritado mucho. Sin duda equivocadamente, pensaba que los defectos que demuestra este, tanto en la elección de conceptos como en la formulación, eran habituales bajo plumas hispánicas (no me limito a España), mientras que la doxa francesa imponía una exigencia de claridad. Allí tenía la prueba de que no era así, sino más bien todo lo contrario. Si hubiera tenido que pronunciarme sobre las dos teorías de la controversia, hubiera optado por la del crítico español. Pero, mi condición de medievalista obligándome a mostrarme cauto a la hora de entrometerme en una temática contemporánea – por eso mi comentario se reduce a precisar el contexto del intercambio[15] -, y considerando que esa controversia es reveladora de un momento de la historia cultural española, decidí limitarme a dar a conocer esos textos.
Por último, quisiera señalar la sorprendente ausencia de cualquier referencia a la creación musical. Cassou se limita a incluir a los músicos en la enumeración de los creadores y, en otro lugar, evoca “el ritmo de la Danza del fuego de Manuel de Falla”. Gómez Baquero no dice nada al propósito. El debate pierde mucho al no mencionar un campo de la creación que tanto contribuyó a hacer entonces de España uno de sus focos más activos en Europa. Resulta tanto más sorprendente cuanto que el crítico español hubiera encontrado en él argumentos incontrovertibles para demostrar que, aún antes de la crisis del 98, su país no se había quedado fuera del “concierto” de las naciones más comprometidas en la innovación.
[1] M. Jean Cassou a bien voulu rédiger pour la Revue de Paris cette conférence récemment prononcée au Collège de France et répétée au Théâtre du Vieux-Colombier [Nota de la Revue de Paris].
[2] Jorge Guillén escribió esas palabras en el homenaje a Ramón del Valle-Inclán publicado por Manuel Azaña en su revista La Pluma (enero de 1923): “¿No es bastante vivir simple y fuertemente — sin más — esta tremenda y magnífica fatalidad de ser español?” Jean Cassou conoció personalmente a Jorge Guillén en aquellos años, siendo el poeta lector de español en la Sorbona.
[3] Epístola moral a Fabio, atribuida a Andrés Fernández de Andrada (1575-1648).
[4] El tema horaciano de la aurea mediocritas.
[5] Traduit en français par Marcel Bataillon, L’Essence de l’Espagne, Collection Charles du Bos [Nota de J. Cassou].
[6] V. Revista de Occidente, déc. 1924 [Nota de J. Cassou].
[7] Obras de Descartes, Kant, Schopenhauer, Auguste Comte y Pascal.
[8] George Borrow.
[9] Nicolas Masson de Morvilliers, Abrégé élémentaire de la géographie vniverselle de l’Espagne et du Portugal, Paris, 1776.
* “¡Qué singular te deseo!”. Tales son, non obstante, las palabras primeras de Baltasar Gracián, al que quiere convertir en héroe. [Nota de J. Cassou]
**¡Cuánta distancia de este grado de refinamiento a la posición elemental de Unamuno, que quiere salvar su cuerpo a la par que el alma, y tiembla de espanto a la idea de perder su integridad de hombre de carne y hueso! Y a todas las alquimias y a todos los sistemas que nos propone el genio francés, y en los que éste se complace en su afán de claridad, el conceptismo unamunesco opone idéntica resistencia: ¡no quiere escoger! Prefiere perdurar desgarrado entre la muerte y la vida, el mundo real y el ideal, las creaciones de su fantasía y el sujeto que imagina. Y no puede nombrar una tesis sin que su extraño genio verbal no nombre en seguida su antítesis. [Nota de J. Cassou]
[10] Hermann Graf von Keyserling, “España y Europa”, Revista de Occidente, n°35 (1926), p. 129-144.
[11] “À nous deux maintenant!” (H. de Balzac, Le Père Goriot).
[12] Carlos de Sessé por Carlos de Seso.
[13] Segunda novela de Cassou, publicada en 1926, en la misma colección que la anterior. Sospecho que un ejemplar acompañó los correos personales que el autor dirigió a Gómez Baquero.
[14] Opino que este párrafo es una cita textual de una carta personal de Jean Cassou dirigida a E. Gómez Baquero posteriormente a la publicación de su segunda respuesta. Lo deja suponer, además del claro galicismo “cojo” (“Je prends l’Espagne où elle est”), la indicación “dice Monsieur Cassou” y la introducción al comentario (Vamos por partes”) que demuestra que lo que antecede es un elemento importado.
[15] Con la excepción del lugar de publicación de las respuestas de Gómez Baquero, que no he conseguido identificar.